Paper Mario, le RPG oublié de la N64

Il y a eu les jeux mythiques de la Nintendo 64 qui eurent leur place au panthéon des jeux vidéo : Super Mario 64, Zelda Ocarina of Time, Banjo & Kazooie, Conker’s Bad Fur Day… Il n’y a pas de doute à cela, ces jeux sont excellents, et ils méritent leur place dans ce panthéon.

Et puis, il y a eu les autres jeux mythiques. Ceux qui sont arrivés trop vite. Ceux qui n’ont pas eu une campagne de com’ marquante. Ceux qui ont été éclipsés par un autre jeu. Et puis, aussi, ceux qui sont arrivés trop tard. Paper Mario fait partie de cette dernière catégorie. Quand il est arrivé en 2001, en fin de vie de la N64, les joueurs lorgnaient déjà vers la GameCube. Depuis, nombreux sont les joueurs disant que le second Paper Mario, La Porte Millénaire, a été leur meilleur Paper Mario. C’est oublier l’énorme potentiel du premier Paper Mario, vrai bon RPG, qui est resté dans les mémoires de ceux qui ont eu la chance de le terminer.Paper Mario est l’un des derniers grands jeux de la Nintendo 64. Et aussi, l’un des plus injustement méconnus, éclipsé par les épisodes Gamecube et Wii de la franchise. Redécouvrons un bijou.

Lorsque Paper Mario sort sur Nintendo 64 en 2001, le maître incontesté de la plateforme n’en est pas à son coup d’essai dans le domaine du RPG. En effet, quelques années avant, sur Super Nintendo, Super Mario RPG avait fait le bonheur des joueurs nippons et américains. Mais ce très bon RPG n’est, las, jamais sorti en Europe. Pour se faire pardonner, Nintendo décida de développer un second RPG pour les joueurs européens, sans oublier ses autres clients. Mais il décida, entre temps, pour éviter la lassitude des joueurs, de changer complètement l’univers et la manière de jouer avec Mario. Un coup de baguette, et Mario se retrouve avec l’épaisseur d’une feuille de papier ! Scepticisme chez les joueurs européens, qui n’attendaient pas cette innovation au tournant. Pourtant, encore une fois, le plombier moustachu a réussi à surprendre son public d’habitués.


Le premier boss du jeu.

 

Un RPG classique ?

Au premier coup de manette, Paper Mario a l’apparence d’un RPG classique au tour par tour. Les différentes attaques du moustachu (saut, combos, puis plus tard marteau), les powerups disponibles, tirés de l’univers du Royaume Champignon, ou encore le système des badges, sont bien tirés du genre RPG. De plus, Mario disposera tout au long de l’aventure d’une pléthore de petits compagnons charismatiques, le gameplay se rapprochant ainsi d’un Final Fantasy par exemple.

Cependant, contrairement à la plupart des RPG, les combats au tour par tour de Paper Mario ne sont pas “plats” : il faut constamment rester aux aguets pour pouvoir se protéger des attaques ennemis (voire contre-attaquer), appuyer sur un bouton au bon moment pour infliger plus de dégâts, charger des combos… Aucune action n’est faite par hasard et le joueur peut contrôler les coups critiques et les évitements… à condition qu’il les réussisse.


Oui, nous sommes bien dans un RPG.

 

Un vrai Royaume Champignon

Paper Mario, en bon RPG qu’il est, permet de décloisonner l’univers du plombier qui était jusque là resté à un vague “Royaume Champignon” et à quelques moments futiles (je pense aux tableaux de Super Mario 64). L’univers, immense sans sembler infini, est retransmis dans un style graphique enchanteur et coloré, mi 2D – mi 3D. Les endroits visités sont variés : désert, île, champs, ciel, neige : il y en a pour tous les goûts. Et même si le parti pris graphique pourrait être déroutant au début, on ne peut pas dire que c’est moche. C’est plutôt même très beau. Et l’ambiance sonore qui va avec est également réussie.


Ne cherchez AUCUNE logique là-dedans.

 

De nouveaux compagnons

RPG au tour par tour oblige, Mario ne sera pas seul dans cette nouvelle aventure. La plupart des RPG du genre nous permettent en effet de contrôler plusieurs personnages en combat. Mais là où certains auraient attendu Luigi ou Yoshi comme compagnons de Mario, Nintendo offre aux “petits oubliés” de l’univers une chance de revenir sur le devant de la scène ! Préparez vous à faire équipe avec un petit Goomba sachant tout sur tout, un Paratroopa facteur, une “lady” Boo armée d’un éventail et d’un majordome, une Cheep Cheep babysitter ultra sensible… Sept compagnons hauts en couleur et ayant chacun leurs capacités aident Mario dans ses combats et sur la carte, pour passer des pièges, vaincre des ennemis plus facilement, etc. Contrairement au plombier qui évolue par niveaux, il faudra trouver pour eux des objets spéciaux pour leur débloquer de nouvelles attaques, mais ils restent quand même très utiles.


On peut influer sur le combat pour infliger plus de dégâts.

 

Une progression linéaire

Malgré l’apparence de la carte qui pourrait faire croire qu’on peut visiter les endroits dans le désordre, à la manière d’un Ocarina of Time, Paper Mario offre une progression linéaire avec différents chapitres. Chaque chapitre possède son ambiance à lui, ses personnages à lui et ses boss à lui. Néanmoins, les personnages restent après avoir terminé le chapitre, et au fur et à mesure de la progression dans le jeu, Mario pourra se déplacer de plus en plus rapidement sur la carte. Les fins de chapitres, avec les boss, font partie des moments les plus marquants du jeu. Ces derniers ne sont pas évidents à battre comparés au reste du chapitre, et une préparation serait de bon augure pour les affronter.


Mais quels cons imbéciles.

 

L’atout scénario

Pas assez long, pas assez représentatif du genre, pas assez de quêtes annexes… Paper Mario n’a pas la carrure pour rivaliser face aux mastodontes du RPG. Néanmoins, la partie scénaristique, qui aurait pu être négligée (comme souvent dans un Mario…) sauve la donne et permet à Paper Mario de se hisser à un niveau respectable. Les personnages originaux, les différentes personnalités, les situations humoristiques permettent de rattraper la teneur de la trame principale, toujours la même (Bowser enlève Peach) et qui pourrait commencer à sentir le réchauffé. Prendre la vieille statue et la décorer avec des accessoires colorés, voilà la recette du scénario de Paper Mario.


Tiens, ça me rappelle quelque chose…

 

Un nouveau concurrent

Super Mario RPG, s’il avait marqué l’entrée du plombier dans le genre, avait été néanmoins développé par Square, développeur des Final Fantasy. Avec Paper Mario, développé uniquement par Nintendo, le plombier s’émancipe et commence à concurrencer les grands du RPG au tour par tour. Quand on le regarde dix ans après sa sortie, Paper Mario pourrait s’apparenter à un coup d’essai du plombier dans ce domaine encore méconnu pour lui, lui qui s’était approprié la maîtrise de la plateforme. Dans les années qui suivent, Paper Mario La Porte Millénaire et la série des Mario & Luigi propulseront véritablement le plombier sur la scène RPG. Mario deviendra alors un véritable concurrent, ayant pris ses marques avec le genre et l’ayant approprié à sa sauce. Grâce à Paper Mario, qui pourrait s’apparenter à un fer de lance, Mario a réussi là où d’autres, comme Sonic (Sonic Chronicles), ont échoué : passer du statut de maître absolu d’un domaine à concurrent multi-genres.


L’aspect papier est souvent bien rendu… trop bien même… brr.

Mais Paper Mario ne doit pas rester avec cette image de “coup d’essai” qu’on lui prête souvent : c’est un vrai bon jeu, assez long sans être lassant, rempli d’humour, ludique et coloré. Avec Paper Mario, la Nintendo 64 a tenu là l’un de ses derniers chefs d’oeuvre, avant de mourir face à la concurrence trop forte. Si vous êtes fan de RPG ou de l’univers de Mario (et j’insiste bien sur le “ou”), ne passez pas à côté !


Aïe.