Le MOBA à l’épreuve, quel jeu choisir ?
On en connaît tous un, mais peu se sont donnés la peine d’en essayer plusieurs. Le MOBA, qui devient aujourd’hui un e-sport à part entière, mérite qu’on s’y intéresse. Si le principe reste le même, les expériences de jeu diffèrent complètement. Désireux d’y voir plus clair, tenté d’essayer autre chose que DotA ou League of Legends? Inside Electronic Pipo les a testés pour vous.Impressions d’un mordu sur DotA , League of Legends, Heroes of Newerth et SoTIS Il y a un an, Max Schreck publiait un article solide sur « League of Legends et son modèle économique ». Aujourd’hui, la tendance se confirme, chez les éditeurs comme chez les joueurs : le MOBA (Massive Online Battle Arena) intéresse de plus en plus de gens, et de nombreuses variantes de l’original DotA (Defense of the Ancients, développé en 2003 sur Warcraft 3) sont aujourd’hui disponibles. Cet article est consacré à l’expérience de jeu sur chaque plateforme, et s’adresse à des joueurs plus ou moins confirmés, à l’aise avec le principe du MOBA. Je ne pense pas être un professionnel en la matière, mais étant passé par DotA (1 et 2), League of Legends, SotIS (rapidement) et Heroes of Newerth, mon expérience me permet de distinguer les points forts et les inconvénients de chaque jeu. Bien entendu, je partage ici un point de vue, toute contribution sous forme de commentaire sera la bienvenue !
Univers et Social:
Innovation dans le MOBA : une équipe de cinq joueurs qui ne se connaissent pas forcément ne peuvent pas gagner s’ils ne coopèrent pas et doivent se répartir arbitrairement des rôles plus ou moins ingrats… La recette parfaite pour des teamchats bien dégueulasses, du trolling récurent et du flame à n’en plus finir. Sans compter que toutes les plateformes n’ont pas eu l’intelligence de ban le teamspeak (cf DotA ou HoN), ce qui fait le bonheur des plus rageux d’entre nous; si vous jouez en société, n’oubliez pas le casque ! Vous l’aurez donc compris, le MOBA, c’est un jeu d’équipe où il vaut mieux jouer entre amis, et encore pas n’importe lesquels (cf la jurisprudence Mycridias v Shadowtomato, pour les plus avertis d’entre nous). D’où l’importance du social, la possibilité de nouer des contacts, d’échanger des informations, de consulter le profil de ses amis, de regarder leurs parties…
Face à cette épineuse question, à ma connaissance, League of Legends est le jeu qui tire le mieux son épingle du jeu. Riot Games a réussi à créer un univers parallèle au jeu, qui détend l’atmosphère et permet aux joueurs de ne pas (trop) se prendre la tête entre eux : un e-sport très vivant qui intéresse la plupart des joueurs et dont beaucoup parlent, le développement de différents modes de jeu qui permettent de se distraire quand on a enchaîné les games de trolls, et dont l’intensité varie (de gentils dominions où personne ne se connaît mais où tout le monde s’entend bien à la ranked en équipe qui se termine parfois en guerre fratricide au sein d’une premade IRL dont les gens se connaissent depuis 12 ans..)
Au milieu du tableau, HoN et DotA 2 qui, en développant leur propre plateforme, ont facilité la création de contacts entre les joueurs, la possibilité de s’ajouter en amis, de lancer le matchmaking à plusieurs, le mode spectateur… Mais en dehors du jeu en soi, la plateforme présente peu d’intérêts, et donc les joueurs y passent moins de temps, sociabilisent moins, etc.. A nuancer avec l’e-sport qui s’annonce sur DotA 2 et qui rendra peut-être la communauté plus vivante.
DotA et SotIS souffrent de ne pas avoir de plateforme dédiée. Le social est complétement inexistant sur les serveurs de base, les joueurs galèrent à rejoindre la même partie, ne se revoient jamais, leavent régulièrement, quand ce n’est pas l’host qui les kick arbitrairement… Ces jeux restent « périphériques » par rapport au jeu de base qui leur sert de support (en l’occurrence Warcraft ou Starcraft II). Ici encore, on peut nuancer ces affirmations avec le développement de serveurs privés qui résolvent ces problèmes. Je ne sais pas trop pour SotIS, mais sur DotA ça change tout. Personnellement, après avoir joué sur Garena (pas top) et sur Dotalicious (bien meilleur), j’ai apprécié le ban des leavers, l’importance accordée aux stats, la possibilité de jouer avec ses amis sans trop de soucis, et l’existence d’une communauté assez restreinte où on peut apprendre à connaître des joueurs. Néophytes et débutants, entraînez-vous avant d’aller tenter votre chance. Le niveau n’a rien à voir avec celui de Battle.net, les joueurs sont des grands malades qui tournent à 3000 parties ; ça reste un repaire de puristes qui fuient le noob, le kevin et le leaver des plateformes traditionnelles.
Un exemple de partie entre deux équipes sur League of Legends, le meilleur moyen de ne pas tomber sur des trolls qui vous ruinent une partie.
Niveau de “skill” requis
Certains des jeux dont j’ai parlé précédemment sont plus accessibles que d’autres, c’est un fait qui conditionne leur réussite économique. Pourquoi ? Parce que le MOBA est injuste, méchant, et pervers. En effet, il impose à chaque membre de l’équipe une phase de laning, qui l’oppose à un ou deux joueurs de l’équipe adverse pendant une vingtaine de minutes, voire plus. Durant ces 20 minutes, les deux adversaires vont faire en sorte de farmer plus que l’autre, ou éventuellement de le tuer. Si l’une de ces deux situations se produit (99,9% des cas), le joueur qui prend le dessus sur l’autre va avoir plus d’argent que son adversaire et plus d’expérience, ce qui va lui permettre de farmer plus, de fragger plus, etc… S’est mis en place le vicieux phénomène appelé « snowball » : un peu de réussite en début de partie va vous permettre (ou à votre adversaire) de massacrer votre vis-à-vis (de vous faire massacrer), et ceci pendant 20 minutes durant lesquelles le malheureux n’aura plus que ses yeux pour pleurer. Les différents jeux gèrent le « snowball » différemment. Certains essayent de l’atténuer, pour donner une chance à un joueur qui a raté son early ou s’est fait contrer, tandis que d’autres estiment que celui qui prend l’avantage au début mérite d’avoir un bien meilleur late game. Je ne me positionne pas pour ou contre le « snowball », mais je pense qu’il pose un problème aux jeux qui l’encouragent : celui qui se fait dominer n’a aucune chance de revenir dans la partie, et ne prend plus de plaisir à jouer. Moins de joueurs par conséquent.
Par niveau de skill requis, en ordre croissant
League of Legends, ou le casual mode de Heroes of Newerth arrivent en première position. Ce sont les modes de jeu où les écarts de niveaux sont les plus écrasés. Profiter d’un adversaire légèrement inférieur n’est pas évident ; sur LoL, le Flash/Ghost (un sort permettant de s’échapper) permettra au joueur dominé de ne pas (trop) feed le joueur adverse, et l’impossibilité pour le plus fort de deny ses propres creeps assurera au second un farm décent, quitte à le prendre sous sa tour. Last but not least, on ne perd pas d’or quand on meurt, et ça, ça change la vie, comme je l’explique plus loin.
Derrière, les autres modes de jeu, à savoir le cruel DotA (1 et 2), SotIS et le « normal mode » de Heroes of Newerth. Sur ces jeux, si votre adversaire est meilleur que vous en phase de laning, c’est triste à dire mais vous avez une forte chance d’être en « no-game ». Tout d’abord, parce que le joueur d’en face va prendre son farm et vous empêcher de prendre le vôtre en faisant les last hits sur ses propres creeps. Impossible de payer quelques items qui vous permettraient de lui tenir tête. Mais ce n’est que le début du triste scénario qui vous attend. Il ne va pas tarder à rechercher le kill, qui va lui être acquis grâce à son farm, et sans trop de difficultés si vous êtes en top ou en bot. En plus de le rendre plus riche, ce kill va vous dépouiller de votre or. Il est donc théoriquement possible de finir la phase de laning avec le même build que lorsque vous l’avez commencé, malgré l’or qui arrive au cours du temps, parce que votre adversaire vous aura juste lessivé. Impossible pour vous d’économiser pour un objet de late game ; redresser la barre relève de l’exploit.
Je ne dis pas qu’un mode est meilleur que l’autre, je dis simplement que l’un permet mieux aux joueurs de s’intégrer. Il peut paraître normal qu’un bon joueur soit récompensé au détriment d’un moins bon, mais cela peut démotiver ce dernier. Je pense qu’on peut parler de jeux « élitistes », où un important temps de jeu est nécessaire pour exister dans la partie, face à des jeux plus « démocratiques », où chacun trouve sa place assez rapidement. Néanmoins, DotA 2 a réalisé un important travail sur l’algorithme de matchmaking : il ne devrait plus y avoir d’importants écarts de niveau au sein d’une même partie, ce qui permettrait de limiter cet effet de snowball.
Ici le first blood pris par Zeus contre Naix lui donne deux niveaux et 400 de gold en plus, et va lui permettre de facilement s’imposer sur la midlane.
Graphisme:
Au niveau des graphismes, un débat sans fin sur la qualité de chaque jeu anime la communauté du MOBA. Le style assez cartoon ou manga de League Of Legends accrochera probablement un public plus jeune que le graphisme plutôt fantasy à la Blizzard de Dota ou Heroes of Newerth. J’ai bien aimé la map de SotIS. Si vous avez aimé l’univers métallique de Starcraft II, vous accrocherez. Vraiment originale, offrant une bonne visibilité, elle permet une prise en main assez rapide. Sur DotA ou HoN, je m’arrache encore les cheveux à connaître toutes les zones d’ombre perverses qui permettent à un adversaire de disparaître alors qu’il était juste devant moi. La tombée de la nuit qui divise la vision par deux, ou encore la possibilité de sauter vers des endroits complètement inaccessibles pour certains héros sont des concepts qui m’échappent… Néanmoins, bravo à l’équipe de DotA pour son nouveau look dans la seconde version, les graphiques sont vraiment bluffants.
Dota2 fait peau neuve, un graphisme épurée pour une meilleure compréhension des teamfights. #tidehunterforthewin
Conclusion:
Un gagnant ? Pas vraiment, mais des jeux différents, pour des publics différents. Chacun d’entre eux vous propose une expérience de jeu que vous apprécierez ou non, en fonction de l’importance que vous accordez à l’univers de jeu, au social, à l’e-sport et au niveau des gens avec qui vous jouez. Le succès de League Of Legends aujourd’hui ne signifie pas que c’est le meilleur MOBA sur le marché, mais certainement que c’est le plus accessible, et le plus à même d’attirer les nouveaux joueurs. Fatigués par le manque de possibilités offertes par LoL, vous pensez en avoir fait le tour ? Allez essayer DotA 2, je vous assure que dans deux ans, vous en apprendrez encore tous les jours. En attendant, n’hésitez pas à partager votre expérience en commentaires, qui permettront à chacun de se faire une idée de chaque jeu cité dans cet article !