[Interview] Le dur métier de testeur

Parfois, en dépit des encouragements de votre grand-mère, vous vous dites que vous ne traverserez jamais le jardin. Ou alors vous avez juste la flemme de vous mettre à bosser et cédez à l’appel hypnotique de votre ordinateur. C’est dans ces moments qu’on se dit qu’on aimerait bien en faire son métier. Jouer et être payé… Être testeur quoi. Nous allons donc tenter de démasquer les clichés sur ce métier grâce à V., testeur à Ubisoft, qui a gentiment accepté de répondre à mes questions.
Qui n’a jamais rêvé d’être payé pour jouer à longueur de journée ? {{Nikka : En quoi ça consiste exactement, être testeur ? Je suppose qu’il ne suffit pas de finir le jeu et de voir s’il est cool…
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V. : Alors la base du métier de testeur est de parcourir un jeu donné et d’en trouver les dysfonctionnements. Après dans le métier du test il y a plusieurs postes
Tu as comme dans tout métier un chef, un sous-chef et les autres. Le chef manage l’équipe et s’occupe du coté gestion, le(s) sous-chef (s) dirige(nt) une équipe qui s’occupe de diverses tâches.

{{Nikka : Ca a l’air assez pyramidal comme fonctionnement… Comment est l’ambiance du coup ?
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V. : L’ambiance est géniale. Une ambiance de travail sérieuse mais avec des gens capables de s’amuser aussi.

{{Nikka : Ouf, tant mieux ! Et donc toi tu fais quoi ?
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V. : Mon rôle est d’être testeur contrôle qualité (QC Tester). Mon job est d’utiliser les outils de production, vérifier s’il y a des dysfonctionnements, les signaler, voir le problème avec les équipes qui peuvent les corriger, et vérifier que suite à la correction il n’y a pas de nouveaux problèmes. Je fais également la même chose pour les problèmes rencontrés dans le jeu.

{{Nikka : En fait c’est super rationalisé ! Comment devient-on testeur ? Quelle formation suivre ? Quelles sont les qualités requises ?
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V. : Au niveau de la formation il n’y a pas vraiment de prérequis… Beaucoup de personnes peuvent faire du test car c’est un métier qui s’apprend en le faisant.

{{Nikka : Je peux faire testeuse après Sciences Po ?
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V. : Oui, rien ne l’empêche. Après il faut aimer les jeux vidéo.

{{Nikka : Yata !
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V. : L’important c’est d’être travailleur, avoir de la rigueur, connaître le monde du jeu vidéo, et avoir un minimum de connaissances en informatique.

{{Nikka : Mais c’est dur de trouver un poste, non ?
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V. : Oui, très. Il y a beaucoup de demande pour peu de postes.

{{Nikka : Donc voilà. Il n’y a pas un petit plus niveau formation, un truc qui fasse bien sur le CV ?
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V. : Beaucoup de testeurs viennent de plus en plus d’écoles de jeu vidéo, donc on va dire que c’est ça le plus.

{{Nikka : Ça existe ?!?
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V. : Oui j’en viens !

{{Nikka : Ah ah et on y apprend quoi ?
}}

V. : En gros beaucoup viennent d’école comme l’ISART, ENJMIN, SUPINFO-GAME… En fonction des formations on y apprend le graphisme (modélisation 3D, etc.), le game design/level design (comment concevoir un jeu vidéo), la programmation.

{{Nikka : Et ça fait longtemps que tu es à Ubisoft ?
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V. : Ça va faire 1 an et demi.

{{Nikka : Et pourquoi avoir choisi de bosser pour eux ?
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V. : Parce que c’est la plus grande entreprise de France, le premier importateur de jeux vidéo japonais, qu’ils sont à la fois éditeur et concepteur… Bref pour pouvoir travailler sur les plus gros jeux.

{{Nikka : Et donc sur quels jeux as-tu travaillé jusqu’ici ?
}}

V. : Ghost Recon Future Soldier et les Lapins Crétins Rabbits Land, sur lequel je bosse encore.

{{Nikka : Il est prévu pour quand ? Je ne suis pas vraiment au fait des dates de sorties des différentes versions des Lapins Crétins
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V. : En gros ce jeu sortira un peu après la WiiU, la nouvelle console Nintendo.

{{Nikka : Et tu travailles longtemps sur le jeu ?
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V. : Un jeu peut prendre entre 6 mois et 3 ans en moyenne

{{Nikka : Ça peut faire beaucoup donc.
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V. : La phase de test commence à partir de la production du jeu. Donc quand le jeu met 3 ans à voir le jour on va dire que je travaille dessus 2ans / 2ans et demi. En fait tu as plusieurs phases dans un projet : la conception, la pré-production et la production. Les testeurs sont présents à partir de la production. Après ça dépend du jeu, par exemple sur les Lapins Crétins j’aurai travaillé 6 mois et 1 an sur Ghost Recon.

{{Nikka : Quel jeu rêves-tu ou aurais-tu rêvé de tester ?
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V. : Je dirais Skyrim dans les jeux récents. Et j’aimerais tester Watch Dogs. Après il faut savoir que rêver est un grand mot. Je dirais plutôt aimer.

{{Nikka : C’est quoi ton jeu préféré ?
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V. : Zelda Ocarina of Time. Un classique !

{{Nikka : Aaah, Sur N64 ?
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V. : Oui. C’est vrai que tu connais un peu.

{{Nikka : Hé hé ! Et ton premier jeu, c’était quoi ?
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V. : Castle of Illusion starring Mickey Mouse sur Mega Drive.

{{Nikka : Ok. Je connais pas mais ça a l’air cool. Moi c’était Marine Malice. Un truc avec des poissons. Mébon c’est pas le sujet.
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V. : Ah oui ça me dit quelque chose…

{{Nikka : Sérieusement ? Bon je me disperse. Quels sont les avantages de bosser dans le jeu vidéo ? (Pour un gamer en tout cas)
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V. : Je pense que c’est totalement personnel comme avis. Comme dans tout métier ça dépend des gens. Pour moi, on va dire que c’est un rêve accompli. Je suis content de pouvoir créer des jeux pour les autres, donc même si je travaille beaucoup, je n’ai pas le stress et les problèmes liés au travail. Après n’y en a pas vraiment. Tu n’as pas plus de choses que les autres. C’est vraiment la passion du jeu vidéo qui prime. Créer et travailler avec des gens qui aiment la même chose que toi.

{{Nikka : Oui je comprends. C’est avant tout histoire de suivre sa passion. Mais s’il n’y a pas d’avantages, y’a-t-il des inconvénients ?
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V. : Oui ! Le salaire et la sécurité de l’emploi (beaucoup de CDD et peu de CDI)

{{Nikka : Mais par moment, au bout d’un an par exemple, tu ne te lasses pas de bosser sur le même jeu ?
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V. : Si parfois bien sûr, mais chaque jour étant différent ça se passe plutôt bien. Après comme je te l’ai dit, pour travailler dans ce milieu il faut être passionné car ça demande beaucoup d’investissement personnel.

{{Nikka : Je vois. Et que conseilles-tu aux Sciences Pistes passionnés de JV ?
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V. : De réfléchir à ce qu’ils préfèrent faire de/dans leur vie. Ce n’est pas parce qu’on aime les jeux vidéo qu’on est forcément fait pour travailler dedans.

{{Nikka : Ah ah ah d’accord. Merci d’avoir répondu à mes questions ! }}